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La saisine héréditaire et les dettes

La saisine héréditaire est le pouvoir qu’ont les héritiers d’appréhender matériellement les biens du défunt. 

Juridiquement, cette situation qualifiée d’investiture légale permet aux héritiers d’entrer en possession des biens successoraux et d’exercer tous les droits du défunt.

Le successeur saisi peut exercer d’emblée les prérogatives attachées à sa qualité, dont l’appréhension matérielle des biens.

La saisine n’emporte pas la transmission de la propriété qui est déjà transmise de plein droit et immédiatement par le décès. 


Elle ne confère pas la propriété mais permet d’entrer en possession de la succession.

Les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt. 

Cette notion juridique dénommée la saisine héréditaire est l’établissement légal que les héritiers saisis par le décès ont sur les biens de la succession, sans formalités.
La saisine héréditaire est une institution du droit successoral.

Un héritier saisi doit entrer en possession effective de la succession et si tel n’est pas le cas, il perd au bout de dix ans le droit de l’accepter.

Si un héritier ignore qu’il est appelé à une succession, il n’en est pas moins saisi des biens qui la composent. 

Il est ainsi sans le savoir substitué au défunt jusqu’au jour où il renoncera à l’héritage.

L’article 724 du Code civil stipule :

« Les héritiers désignés par la loi sont saisis de plein droit des biens, droits et actions du défunt.
Les légataires et donataires universels sont saisis dans les conditions prévues au titre II du présent livre.
A leur défaut, la succession est acquise à l'Etat, qui doit se faire envoyer en possession. »

Les héritiers envisagés par l’article 724 du Code civil sont :
- Le conjoint survivant ;
- Le légataire universel ;
- Légataire particulier ayant la qualité d’héritier ;
- L’Etat ;

L’héritier se trouve saisi des biens de la succession au lieu où ils se trouvent au moment du décès et c’est en ce lieu qu’il doit les appréhender.  

La saisine héréditaire a pour conséquences l’appréhension des biens du défunt ou prise de possession des biens héréditaires.

L’héritier peut agir seul même si les biens sont indivis et bénéficie de diverses prérogatives. 

Ainsi, tout héritier est fondé, même avant le partage et même sans le concours de ses coïndivisaires à agir en justice.

Il a en ce sens été jugé : 

- L’héritier peut entreprendre une action en indemnisation d’un préjudice subi par le de cujus.
- Les héritiers peuvent demander la disqualification d’un contrat de prestation de services en contrat de travail étant entré dans le patrimoine du défunt, ceux-ci en sont saisis de plein droit, peu important qu’il n'ait pas intenté cette action de son vivant et que celle des ayants droit ait pour finalité de leur permettre de bénéficier des effets du contrat d’assurance groupe souscrit par l’employeur et qui constitue un avantage accessoire au contrat de travail.
- Chacun des héritiers légitimes, saisi de plein droit de l’action du défunt, a qualité pour la poursuivre seul. 
- Les héritiers du titulaire d’un droit à caractère personnel peuvent, sauf exception, poursuivre l’instance engagée par leur auteur.
- Le droit à réparation du dommage résultant de la souffrance physique éprouvée par la victime avant son décès, étant né dans son patrimoine, se transmet à ses héritiers.

A l’inverse, l’héritier légitime, saisi de plein droit des biens, droits et actions du défunt, peut être poursuivi par les créanciers de la succession, sauf s’il a renoncé à celle-ci ou s’il démontre qu’il est primé par des héritiers plus proches ou exclu par un légataire universel ou que la dette doit être divisée entre les héritiers au prorata de leurs droits respectifs.

Lorsqu’il y a plusieurs héritiers, chacun est saisi pour la totalité de la succession jusqu’au partage et non uniquement pour les droits auxquels il pourrait prétendre.

Ce point peut être source de difficultés lorsqu’un héritier est poursuivi en justice.

C’est ce qu’illustre un arrêt rendu le 12 juin 2024 (Cass. 1ère Civ. n° 22-16.817F-D).

Dans le cas d’espèce, l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (Centre national du chèque emploi service universel) ou l’URSSAF a notifié à Mr E une mise en demeure puis, le 21 novembre 2018, lui a signifié une contrainte portant sur des cotisations de particulier employeur dues par Mme B E, sa mère, décédée le 13 décembre 2011.

Mr E a formé opposition à cette contrainte.

Dans un arrêt du 25 mars 2022, la cour d’Appel de TOULOUSE a annulé la contrainte signifiée le 21 novembre 2018 à Mr E au motif que l’URSSAF avait signifié à Mr W E une contrainte au titre de cotisations sociales non acquittées par B E et avait eu connaissance de l’existence de plusieurs héritiers de B E.
L’URSSAF pouvait vérifier et confirmer leur identité exacte auprès du notaire en charge de la succession.
Il lui appartenait de diviser les poursuites en justice à l’encontre de chacun des héritiers pour leur part.

Dans son arrêt, la Cour d’Appel n’a pas validé la contrainte prise à l’encontre d’un seul des héritiers de la débitrice.

L’URSSAF a formé un pourvoi en cassation en faisant valoir que c’était au fils de rapporter la preuve d’une division entre les héritiers au prorata de leurs droits respectifs et non à elle de rechercher l’identité exacte des héritiers ainsi que l’étendue de leurs droits dans la succession.

Dans son arrêt du 12 juin 2024 la Cour de Cassation casse l’arrêt de la Cour d’Appel 25 mars 2022 en énonçant que cette dernière a inversé la charge de la preuve.

Il en résulte que la saisine héréditaire engendre l’obligation de l’héritier saisi au paiement des dettes du défunt. 

L’héritier saisi peut être poursuivi par les créanciers de la succession et ce, avant même de l’avoir accepté.

L’héritier saisi peut éviter les poursuites s’il renonce à la succession ou s’il peut démontrer qu’il est primé par des héritiers plus proches ou exclu par un légataire universel, ou encore que la dette doit être divisée entre les héritiers au prorata de leurs droits respectifs.

Dans l’arrêt précité, il appartenait au fils de rapporter la preuve d’une part, de l’existence d’autres héritiers et d’autre part, de l’étendue de leurs droits dans la succession. 

Le cabinet de Maître BOURGHOUD, avocat à MARSEILLE, peut vous conseiller sur ce point. Vous pouvez nous contacter par courriel ou par téléphone.

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