Dans les devoirs et droits respectifs des époux prévus par le code civil, se trouve le devoir de fidélité.
Avec le temps et l’évolution des mœurs le devoir de fidélité a perdu de son intensité.
Désormais, la seule infidélité charnelle ne suffit plus à établir une faute cause de divorce.
Dès 2011, La Cour de Cassation a posé le principe selon lequel un contrat de courtage matrimonial peut être conclu par une personne mariée (Cass 1ère civ. 4 nov. 2011 n° 10-20.114).
Plus récemment, dans un arrêt du 16 décembre 2020 (Civ. 1ère FS-P+I n° 19-19.387), la Cour de Cassation a approuvé la cour d’appel de PARIS d’avoir refusé de prononcer l’interdiction d’une campagne publicitaire du site de rencontres extraconjugales Gleeden.com.
Les faits de l’espèce sont les suivants.
Gleeden.com est un site de rencontres qui vise particulièrement les personnes mariées.
En 2015, la société éditrice du site a lancé une campagne d’affichage sur les autobus, à Paris et en Île-de-France.
Les affiches faisaient apparaître une pomme croquée accompagnée d’une phrase de présentation assez explicite quant au public visé : « Le premier site de rencontres extraconjugales ».
D’autres affiches ont été placardées dans les transports parisiens avec des slogans évocateurs : « Tromper son mari, ce n’est pas la fin du monde », « Par principe, nous ne proposons pas de carte de fidélité » ou encore « C’est parfois en restant fidèle qu’on se trompe le plus ».
Face à ces affiches, la Confédération nationale des associations familiales catholiques (CNAFC) a assigné la société éditrice du site devant le tribunal de grande instance de PARIS et, à l’appui du devoir de fidélité, demandait ; de juger nuls pour cause illicite les contrats conclus entre la société et les utilisateurs du site ainsi que l’interdiction des publicités faisant référence à l’infidélité.
En première instance, la CNAFC a été déboutée de ses demandes.
La CNFAC a interjeté appel en demandant que soit ordonné à la société de cesser de faire référence, de quelque manière que ce soit, à l’infidélité ou au caractère extraconjugal de son activité.
La Cour d’Appel a débouté la CNFAC.
En première instance ainsi qu’en appel, les magistrats ont, en substance, estimé que la violation du devoir de fidélité ne peut être invoquée que par l’époux trompé.
Cette obligation de fidélité ne regardant que les époux, encourager à sa violation ne saurait être une activité illicite, pas plus que faire la promotion de sites facilitant une telle violation.
Ainsi, aucun motif ne justifie l’interdiction d’une telle campagne.
C’est dans ces circonstances que la Cour de Cassation a eu à se prononcer sur ce litige.
Dans son pourvoi devant la Cour de Cassation, la CNFAC s’est fondée notamment, sur l’obligation de fidélité entre époux édictée à l’article 212 du Code Civil.
La Cour de cassation rejette le pourvoi en énonçant : « Ayant ainsi fait ressortir l’absence de sanction civile de l’adultère en dehors de la sphère des relations entre époux, partant, l’absence d’interdiction légale de la promotion à des fins commerciales des rencontres extraconjugales, et, en tout état de cause, le caractère disproportionné de l’ingérence dans l’exercice du droit à la liberté d’expression que constituerait l’interdiction de la campagne publicitaire litigieuse, la cour d’appel a, par ces seuls motifs […] légalement justifié sa décision ».
Les enseignements suivants peuvent être tirés de cet arrêt :
- Il n’est pas interdit de faire la promotion à des fins commerciales de rencontres extra-conjugales ;
- La campagne publicitaire litigieuse ne revêt pas d’aspect indécent ou choquant en termes d’image ou de vocabulaire, pouvant gêner les enfants ;
- La campagne publicitaire litigieuse relève de la liberté d’expression ;
Cet arrêt interroge sur le devenir de l’obligation de fidélité et donnera certainement lieu à d’âpres débats.
Le cabinet de Maître BOURGHOUD, avocat à MARSEILLE, peut vous conseiller sur ce point. Vous pouvez
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